BMW a toujours fait figure d’avant-garde lorsqu’il s’agit d’électrifier sa gamme, mais aujourd’hui c’est une nouvelle recette qui fait mouche : offrir des véhicules 100 % électriques dont la carrosserie ne se distingue presque pas des modèles à combustion. Derrière cette stratégie de « déguisement » se cache une conviction simple : les acheteurs achètent d’abord une marque, puis un design, et non un type de moteur. Explications.

De l’i3 aux nouvelles séries : l’évolution d’un parti pris

En 2013, le BMW i3 arrivait comme un ovni sur les routes : coque en carbone, ligne futuriste, porte-à-faux avant minimaliste. Conçu pour afficher clairement son statut d’électrique, il a polarisé les opinions et, malgré son charme, n’a pas atteint les volumes espérés : 250 000 exemplaires produits en neuf ans. Aujourd’hui, la règle est inversée. Les nouveaux i4, i7 ou i5 se contentent de reprendre les formes et proportions de leurs homologues thermiques :

  • Le i4 semble taillé dans le même moule que la Série 4, bien qu’il soit rehaussé de quelques centimètres.
  • Le i7 reprend intégralement la silhouette de la Série 7, avec seulement l’inscription « i7 » pour le distinguer.
  • La Nouvelle Série 5 et son pendant i5 affichent une hauteur de caisse accrue (+ 3,6 cm) mais conservent un profil identique.

Cette approche minimise le choc visuel et facilite l’acceptation du passage à l’électrique par les clients fidèles à la marque bavaroise.

Adrian van Hooydonk : « Un besoin d’uniformité »

Adrian van Hooydonk, directeur du design BMW, confirme que cette stratégie répond aux attentes d’une clientèle qui achète « une voiture BMW » avant tout, et non « une voiture électrique ». Dans le podcast Moove, il explique :

  • « Au début, il fallait montrer qu’un E-Auto était différent pour valoriser l’innovation. Aujourd’hui, nous voulons simplifier le choix du client. »
  • « La nouvelle plateforme dite « Nouvelle Classe » n’aura pas de carrosserie spécifique : le client ne subira aucune pression, qu’il choisisse thermique ou électrique. »

En substance, le design se veut décloisonné : la seule distinction réside dans le badge arrière. Résultat : un i5 est reconnaissable à peine plus qu’un 530i, mais l’un est 100 % électrique et l’autre à essence.

Les bénéfices concrets pour BMW

Cette homogénéisation visuelle répond à plusieurs objectifs :

  • Réduction des coûts industriels : même ligne d’assemblage, mêmes moules de presse ; seule la motorisation et certains modules électroniques changent.
  • Accélération du lancement : pas de développement lourd d’une nouvelle carrosserie, un simple « rebadge » électrique.
  • Transparence pour le client : l’expérience esthétique et ergonomique d’une Série 5 est conservée, évitant la crainte d’un « voiture d’un autre monde ».
  • Image de marque cohérente : que le parc soit mixte thermique/électrique, l’identité visuelle BMW reste inchangée.

Les exemples chez les autres constructeurs

BMW n’est pas le seul à franchir ce pas :

  • Volkswagen annonce pour 2028/2029 la disparition des noms « ID.3 », « ID.4 », etc., au profit des appellations thermiques traditionnelles (Golf, T-Roc), accompagnées d’un simple « ID. » en préfixe.
  • Mercedes peine encore avec ses EQE et EQS, trop marqués « rond et lisse » ; la marque revoit progressivement ses lignes pour un design plus proche de la Classe E et de la Classe S.

Cet alignement permet de réduire la crainte psychologique du consommateur face aux formes très « aérodynamiques » et au vocabulaire technique étranger des premières générations de véhicules électriques.

Le virage complet avec la « Nouvelle Classe »

BMW s’apprête à lancer la « Nouvelle Classe », dont la première mouture électrique sera un nouveau i3, mais sans aucun lien stylistique ni technique avec l’ancêtre. Ce futur i3 aura le même gabarit que la Série 3 thermique, tout en étant 100 % électrique. L’ère du modèle « exclusif » s’achève : place à la convergence des gammes, où le bloc de batterie et les moteurs sont le seul véritable différenciateur.

Un pari sur l’avenir de la mobilité

En affirmant qu’il ne « faut pas choisir entre thermique et électrique » mais « offrir les deux en miroir », BMW et ses concurrents posent les bases d’une transition douce. Le succès se mesure aux ventes : malgré la pause du iX3, BMW reste le leader des marques premium en Europe, grâce à une offre électrique qui ne détonne pas dans son catalogue. Et pour le consommateur, l’achat d’une voiture au design familier facilite l’adoption d’une mobilité plus propre.

D’un point de vue industriel comme marketing, l’uniformisation des silhouettes réduit les coûts, accélère la mise sur le marché et rassure le client. En fin de compte, c’est peut-être moins le moteur que la carrosserie qui déterminera le succès commercial des voitures électriques de demain.

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