Aux États-Unis, la politique auto change de cap : le gouvernement Trump a décidé de réduire drastiquement les objectifs de CO₂ et d’abandonner le calendrier de suppression progressive des véhicules thermiques. Une décision qui ravit les acteurs du secteur traditionnel et relance une économie du carburant fossile en perte de vitesse depuis plusieurs années.
Abandon des normes CO₂ : un souffle vital pour le thermique
Le 1er août 2025, l’administration américaine a officialisé la suspension des objectifs de réduction des émissions de CO₂ pour les véhicules neufs. Concrètement :
- Les objectifs 2026–2027 sont supprimés, les constructeurs n’ont plus à atteindre de quotas de baisse drastique des émissions.
- La California Air Resources Board (CARB) perd son « waiver », supprimant ainsi ses propres standards plus stricts.
- Les sanctions financières pour non-respect des normes sont fortement atténuées, voire neutralisées.
Conséquence immédiate : les véhicules « gros moteurs » reprennent de l’attrait, et la transition vers l’électrique marque un net ralentissement.
Stellantis se frotte les mains et relance le V8 Hemi
Le groupe Stellantis, héritier de Chrysler aux États-Unis, a annoncé la remise en production de son légendaire moteur V8 Hemi dans les pick-up et SUV hauts de gamme :
- Un V8 biturbo de 5,7 l avec plus de 400 ch, remplaçant temporairement les blocs V6 hybrides.
- Des plateformes modifiées pour accueillir ce moteur de forte cylindrée sans pénalité CO₂.
- Un objectif de marge brute accrue sur les modèles américains où la demande pour le couple et la sonorité d’un V8 reste très forte.
Avec des coûts de reconnectivité inférieurs et des amendes réduites, Stellantis espère retrouver des profits similaires à ceux des années 2010.
Zulieferer traditionnels : la relance des commandes
Du côté des équipementiers, on observe un retour en force :
- Les spécialistes de turbocompresseurs, filtres à particules et moteurs d’essuie-glace voient leurs carnets de commandes se remplir à nouveau.
- Les fonderies de pièces moteur et ateliers de rectification connaissent une hausse de 20–30 % d’activité.
- Plusieurs usines relocalisent partiellement certaines chaînes d’assemblage aux États-Unis pour éviter de futurs droits de douane ou remonter la traçabilité locale.
Ce mouvement profite particulièrement aux PME régionales qui avaient vu leur chiffre d’affaires chuter avec la vague de normes « vertes » sous l’ère Biden.
Carburants fossiles et biocarburants : un marché revigoré
La filière pétrolière, jusqu’alors confrontée à des perspectives de chute de la demande automobile, accueille favorablement la nouvelle donne :
- Les raffineries américaines sont autorisées à prolonger leur exploitation sans contraintes d’investissements dans les unités de désulfuration ou de production d’hydrogène vert.
- Les carburants dits « synthétiques » et biocarburants, déjà au cœur de débats écologiques, misent désormais sur la stabilité de la demande des véhicules thermiques.
- Des partenariats resurgissent entre pétroliers et constructeurs pour tester des mélanges E10, E15, voire E20 sur des modèles non conçus initialement pour ces carburants.
La stratégie vise à rassurer les automobilistes sur la disponibilité « classique » des stations-service, évitant de creuser l’écart de confiance avec la filière électrique.
Électrique en crise : start-ups fragilisées et Tesla à la peine
Chez les spécialistes de la mobilité électrique, pour beaucoup l’heure est aux coupes budgétaires :
- Les subventions fédérales à l’achat d’E-Véhicules (IRA Credits) sont gelées, privant des milliers de clients potentiels du soutien financier.
- Les infrastructures de recharge voient leurs investissements ralentir faute de garanties d’exploitation à long terme.
- Sous la pression, plusieurs start-ups (Rivian, Lucid) ont annoncé des décalages de production et des réductions d’effectifs.
- Tesla, moins dépendant des aides, surfe sur la concurrence affaiblie, mais constate pour la première fois depuis sept ans des ventes en baisse aux USA.
Perspectives et enjeux
Si à court terme ce basculement profite nettement aux acteurs du thermique, plusieurs questions demeurent :
- La compétitivité mondiale : les marchés européen et chinois renforcent leurs normes antipollution, isolant potentiellement l’export US.
- L’acceptation sociale : face à la crise climatique, la nouvelle orientation risque de créer des tensions avec la jeunesse et les ONG environnementales.
- L’innovation technologique : les investissements R&D en matière d’hydrogène et de moteurs hybrides pourraient être reportés ou annulés, avec un retard de 5 à 10 ans pour certaines filières.
En somme, l’ère Trump relance le moteur thermique et l’industrie pétrolière, mais soulève de nombreuses incertitudes sur la compétitivité et la responsabilité sociale de la filière automobile américaine dans un contexte global.