Un audit inédit par l’ADAC le long des autoroutes allemandes

L’ADAC a réalisé pour la première fois une étude exhaustive des infrastructures de recharge électrique sur les 15 plus longues autoroutes d’Allemagne. Au total, 50 sites ont été inspectés, répartis entre 25 aires de repos (Rastanlagen) et 25 relais routiers (Autohöfe). L’objectif : évaluer la qualité de l’expérience de charge pour les conducteurs d’EV en long trajet, un segment où 85 % des utilisateurs se reposent sur ces points de charge.

Des notes souvent décevantes

Plus de la moitié des 50 sites testés ont reçu la mention « mangelhaft » (insuffisant) ou « sehr mangelhaft » (très insuffisant). À l’inverse, seuls 13 sites ont été jugés « gut » (satisfaisant) et aucun n’a décroché la mention « sehr gut ». Les relais routiers (Autohöfe) ont recueilli toutes les évaluations positives, tandis que les aires de repos (Rastanlagen) ont globalement obtenu de piètres résultats.

Autohöfe vs Rastanlagen : un fossé de performances

Les Autohöfe se distinguent par :

  • Un nombre supérieur de points de charge.
  • Une puissance de charge plus élevée, souvent 150 à 300 kW.
  • Des services annexes complets (restauration, sanitaires, zones d’attente abritées).
  • Les Rastanlagen, quant à elles, présentent très souvent :

  • Une offre limitée à des bornes 50 kW, jugées insuffisantes pour une recharge rapide.
  • Peu ou pas d’abris, exposant les conducteurs aux intempéries.
  • Des emplacements de parking inadaptés pour les véhicules longs (camping-cars, remorques).
  • Puissance de charge : un frein à l’efficacité

    Pour une recharge rapide sur autoroute, l’ADAC recommande une puissance minimale de 150 kW afin de récupérer en 20 à 30 minutes l’énergie nécessaire pour 200 à 300 km d’autonomie. Pourtant :

  • Plus de 20 % des sites proposent uniquement des bornes 50 kW.
  • 30 % des stations ont au moins un point de charge défectueux lors du test.
  • Deux sites phares—Rosi’s Autohof Fulda Nord (A7) et Inntaler Autohof Raubling (A93)—offrent des bornes 400 kW et ont obtenu un « gut » mérité.
  • 31 stations (62 %) disposent de bornes jusqu’à 300 kW.
  • Cependant, l’absence de puissance suffisante sur de nombreuses aires limite sévèrement l’attrait pour les conducteurs de véhicules électriques sur longue distance.

    Fiabilité et pannes : un risque trop fréquent

    La présence de bornes hors service ajoute une source majeure d’anxiété :

  • Près d’un tiers des sites présentaient au moins un point de charge indisponible.
  • Des pannes sporadiques compliquent la planification de la recharge, surtout entre deux haltes de plus de 100 km.
  • L’absence de signalisation précise sur les pannes force parfois les conducteurs à rechercher manuellement une borne fonctionnelle.
  • Confort et ergonomie : des attentes frustrées

    Au-delà de la recharge, l’expérience utilisateur pâtit du manque d’aménagement :

    • Aucun site testé ne propose de zones de recharge abritées, exposant à la pluie ou à la neige.
    • Seuls deux Autohöfe permettent le stationnement longitudinal pour véhicules longs sans dételer la remorque ou le camping-car.
    • Éclairage insuffisant la nuit, obligeant parfois à recharger dans l’obscurité.

    Paiement et transparence : des progrès à faire

    Le modèle de facturation et les modes de paiement restent hétérogènes :

  • Seulement 55 % des sites acceptent le paiement direct à la borne (carte bancaire, appli).
  • La tarification au kWh est affichée avant la charge, mais le coût total n’est visible qu’à 44 % des stations.
  • L’ADAC souligne qu’une telle opacité serait impensable dans les stations-service classiques.
  • Les freins juridiques au déploiement express

    Le développement des bornes rapides sur autoroutes est ralenti par un litige entre l’Autorité des autoroutes (Autobahn GmbH) et le concessionnaire Tank & Rast. Un contrat de déploiement de bornes avait été attribué sans appel d’offres, provoquant une suspension des travaux pendant plusieurs mois. Seules des bornes 50 kW ont été activées sous autorisation provisoire, alors que les appels à 150 kW et plus restaient en suspens.

    Recommandations pour un maillage efficace

    Pour encourager la mobilité électrique en longue distance, l’ADAC préconise :

    • Une densification des Autohöfe à haute puissance (≥ 150 kW).
    • L’installation de canopées pour protéger des intempéries.
    • Un éclairage renforcé et des places de parking adaptées aux véhicules longs.
    • Une normalisation des modes de paiement, avec affichage clair des prix avant chaque charge.
    • Une maintenance proactive pour réduire au minimum les pannes.

    Le défi de la transition pour les conducteurs et les opérateurs

    Les résultats de ce test illustrent un décalage entre les attentes des conducteurs EV—qui veulent une expérience de recharge fluide et rapide—et l’infrastructure actuelle. Pour les exploitants, il s’agit désormais de combiner :

    • Investissements massifs dans des bornes haute puissance.
    • Partenariats publics-privés pour lever les contraintes juridiques.
    • Amélioration du confort et de la transparence tarifaire.

    Sans ces évolutions, la confiance des usagers en mobilité électrique sur autoroute restera fragile.

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