Le « Batmobil » E9/R1 : vraiment la toute première BMW M mise en vente ?

Un châssis, une légende : la mise en vente annoncée d’un BMW 3.0 CSL portant la référence E9/R1 a fait vaciller la planète des collectionneurs. Si l’hypothèse se confirme, il ne s’agirait pas seulement d’un exemplaire rare du CSL d’usine, mais très probablement de la toute première automobile conçue et montée par la toute nouvelle filiale BMW Motorsport — l’embryon de ce qui deviendra BMW M. Le mythe, déjà énorme, prend ici une tournure historique : E9/R1 serait la « genèse » matérielle de la saga M.

Contexte : pourquoi ce châssis compte autant

Le BMW 3.0 CSL est une des icônes du sport automobile des années 1970, conçu pour homologuer un coupé léger et rapide sur la base de la série E9. Mais l’histoire du CSL va bien au‑delà d’un simple modèle de route : c’est un véhicule qui, grâce à son développement en version course, a posé les jalons du succès sportif de BMW. La partie la plus fascinante ici est la chronologie : la Motorsport GmbH fut montée en 1972 à l’initiative de Bob Lutz et d’autres acteurs pour internaliser la préparation et la compétition — et E9/R1, assemblé durant l’hiver 1972/73, apparaît comme le laboratoire roulant originel de ce projet.

E9/R1 : un prototype devenu référence

La désignation E9/R1 signale, selon la documentation rassemblée autour du véhicule, qu’il s’agit d’un prototype de développement initial. Il aurait donc servi de banc d’essais pour le futur kit aérodynamique « Batmobil » — ces appendices, becquets et ailes élargies si caractéristiques qui allaient rendre le CSL immédiatement reconnaissable et redoutable en course. Des essais menés par des pilotes comme Hans‑Joachim « Strietzel » Stuck et des ingénieurs tels que Harald Menzel ont permis d’optimiser l’ensemble et d’homologuer le kit le 1er juillet 1973.

Un rôle clé dans l’histoire du sport‑protouring

Le parcours du CSL en compétition est exemplaire : il a servi de machine à gagner en DRM (Deutsche Rennsport Meisterschaft) et plus tard en IMSA aux États‑Unis, contribuant à construire la réputation de BMW comme marque de sport. Les victoires, records et titres remportés entre 1973 et la fin de la décennie matérialisent le succès de cette stratégie, et E9/R1 est présentée comme une pièce centrale de cette genèse.

Restaurations, provenance et palmarès

Le véhicule désormais proposé par le marchand britannique Dylan Miles aurait une histoire documentée : après une carrière en compétition, il aurait transité par les États‑Unis puis le Mexique avant d’intégrer des collections privées et de faire l’objet d’une restauration fidèle. Sa présentation publique au Goodwood Festival of Speed 2021 et sa distinction au Salon Privé de Blenheim Palace, où il a remporté le prix de la voiture la plus iconique, renforcent la crédibilité de sa filiation et de son état historique.

Valeur historique et estimations de prix

Dans le monde des classiques, l’authenticité, la traçabilité et la rareté déterminent la valeur plus que toute autre chose. Les 3.0 CSL d’usine sont déjà rares (seulement 167 exemplaires de certaines versions) et recherchés ; un châssis identifié comme E9/R1 — si la documentation et la concordance historique tiennent — pourrait atteindre des sommets en enchères. Le vendeur ne communique pas de prix ouvertement, préférant une appréciation sur demande : un signe classique que l’objet pourrait viser des dizaines de millions d’euros selon le marché et l’acheteur potentiel.

Questions clés à vérifier avant toute transaction

  • Authenticité des numéros : correspondance des numéros de châssis, tampons d’usine et dossiers d’entretien.
  • Provenance complète : trajectoire du véhicule depuis l’usine jusqu’au dossier actuel, factures, certificats, photos d’époque.
  • Travaux de restauration : nature, qualité, pièces utilisées (authentiques ou reproductions), documents d’atelier.
  • Palmarès compétitif : éligibilité aux grands concours et « racing pedigree » confirmés par des preuves.
  • Expertises indépendantes : rapports d’experts, attestions de maisons de vente ou de spécialistes reconnus.
  • Pourquoi E9/R1 fascine tant les collectionneurs

    Au‑delà de la rareté, E9/R1 incarne un moment charnière : la transition d’un constructeur vers une branche dédiée au sport, la naissance d’un savoir‑faire interne et la cristallisation d’une identité technique et esthétique (les appendices aérodynamiques, la recherche du rapport poids/puissance, etc.). Pour un collectionneur, posséder un tel objet, c’est non seulement acquérir une voiture, mais conserver un fragment fondateur de l’histoire automobile moderne.

    Les implications pour le marché des classiques

    La mise en vente d’un tel exemplaire — si elle se traduit par une transaction publique ou une enchère majeure — pourrait redistribuer les cartes du marché des automobilia de prestige. Les prix des références historiques se montrent souvent contagieux : la vente d’une pièce d’exception hausse ensuite automatiquement la cote des modèles connexes et suscite de nouvelles convoitises. De plus, cet événement rappelle combien la documentation et la rigueur historique restent des garde‑fous indispensables face à la spéculation.

    À suivre : vérifications et évolution de l’annonce

    Pour l’heure, l’annonce chez Dylan Miles alimente spéculations et attentes. Les confirmations ultérieures (expertises, archivage BMW, preuves photographiques, documents d’usine) seront déterminantes pour établir définitivement si E9/R1 est bien ce qu’on annonce. Si tel est le cas, nous aurons affaire à une vente qui marquera durablement l’histoire des collectionneurs BMW et du patrimoine automobile mondial — un véhicule à la fois laboratoire, champion et artefact historique.

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