Le calendrier européen pour la fin des thermiques
En septembre 2025, le Parlement européen et le Conseil des ministres ont entamé des négociations sur la proposition de la Commission : interdire toute immatriculation de véhicules neufs équipés de moteurs à combustion interne (essence et diesel) à partir du 1er janvier 2035. Cette mesure, inscrite dans le paquet « Fit for 55 », a pour objectif de réduire massivement les émissions de CO₂ du transport routier et de tenir l’engagement de neutralité carbone de l’UE à l’horizon 2050.
Les arguments en faveur de l’interdiction
- Réduction des émissions de gaz à effet de serre : le transport routier représente près de 20 % des émissions de CO₂ de l’UE. Passer intégralement aux véhicules zéro-émission accélérera la trajectoire vers les -55 % de CO₂ d’ici 2030.
- Amélioration de la qualité de l’air : l’élimination progressive des moteurs thermiques entraînera une baisse des particules fines (PM2,5) et des oxydes d’azote (NOₓ), responsables de problèmes respiratoires et cardiovasculaires, notamment dans les zones urbaines.
- Stimulation de la filière électrique : en imposant une échéance claire, l’UE encourage les constructeurs à accroître les investissements dans les technologies de batteries, les moteurs électriques et la recherche sur les infrastructures de recharge rapide.
- Sécurité énergétique : réduire la dépendance au pétrole importé renforce la résilience face aux fluctuations géopolitiques et aux crises d’approvisionnement, limitant l’impact des chocs sur le prix des carburants.
- Création d’emplois « verts » : la transition énergétique du secteur automobile promet de nouveaux métiers dans la production de batteries, l’installation de bornes de recharge et la maintenance des systèmes de gestion de l’énergie.
Les freins et réserves exprimés
- Coût de transition pour les consommateurs : le prix d’achat moyen d’un véhicule électrique reste supérieur à celui d’un véhicule thermique comparable, même si les coûts baissent progressivement. Les ménages modestes pourraient être exclus de la mobilité électrique sans aides ciblées.
- Insuffisance des infrastructures : malgré les objectifs d’un point de recharge tous les 60 km sur le réseau transeuropéen, de nombreuses zones rurales ou montagneuses disposent encore d’un maillage trop faible pour garantir une utilisation sereine des VE.
- Émissions liées à la production de batteries : la fabrication et le recyclage des batteries lithium-ion génèrent des émissions de CO₂ et des impacts environnementaux (exploitation minière, consommation d’eau). Certains États plaident pour un calendrier plus souple afin de développer des filières de recyclage plus vertes.
- Résilience du réseau électrique : l’augmentation rapide de la demande en électricité pour recharger les millions de VE attendus d’ici 2035 pose la question de l’adaptation du réseau, du développement des énergies renouvelables et des capacités de stockage (batteries stationnaires, hydrogène).
- Intérêt pour les motorisations hybrides et H2 : plusieurs États membres (Allemagne, Italie, Pologne) proposent de maintenir les hybrides rechargeables ou les véhicules à hydrogène au-delà de 2035, soulignant leur rôle transitoire pour réduire les émissions sans renoncer à l’autonomie conséquente.
- Impact sur l’emploi industriel : certaines régions européennes dépendent fortement des usines de moteurs thermiques. Une extinction trop rapide pourrait entraîner des suppressions massives de postes avant l’émergence des filières du futur.
Voies alternatives et compromis envisagés
Pour dépasser l’impasse, les négociateurs étudient plusieurs pistes :
- Dérogations temporaires pour les véhicules utilitaires, poids lourds ou modèles de niche (voitures de collection, sportives) au-delà de 2035.
- Objectifs intermédiaires pour les émissions de CO₂ (septembre 2030, 2032), afin d’encourager une montée en cadence plus graduelle de la production de VE.
- Incitations financières renforcées : bonus, primes à la conversion et aides à l’infrastructure pour compenser les surcoûts et accélérer la bascule vers l’électrique.
- Soutien à la formation et aux reconversions dans les régions industrielles concernées, pour orienter les ouvriers et techniciens vers les métiers de l’électromobilité et de la gestion d’énergie.
La position des constructeurs et acteurs industriels
Les grands groupes européens ont accueilli favorablement l’objectif 2035, certains annonçant aujourd’hui la fin de la production de moteurs thermiques dès 2030. D’autres, plus prudents, plaident pour une solution « tous carburants » intégrant l’électrification, l’hydrogène et les carburants synthétiques (e-fuels) produits à partir d’électricité renouvelable.
Calendrier politique et prochaines étapes
Après l’accord de principe trouvé le 16 septembre entre Parlement, Conseil et Commission, l’UE doit finaliser le texte dans les prochains mois. La phase de trilogue se poursuivra jusqu’à la fin 2025, avant le vote définitif au sein des deux assemblées législatives. L’entrée en vigueur, si elle est maintenue, marquera un tournant historique : la disparition programmée des ventes de véhicules neufs à moteur thermique en Europe.
Ce qui attend les conducteurs
À horizon 2035, toute voiture neuve achetée dans l’UE devra être zéro-émission. Pour les conducteurs :
- Choix restrictif : seul l’électrique (100 % batterie ou pile à combustible hydrogène) sera disponible.
- Usure de la valeur de revente : les véhicules thermiques deviendront des biens d’occasion de niche, avec une décote accélérée.
- Innovation continue : on peut attendre des autonomies dépassant 700 km et des recharges ultra-rapides à plus de 350 kW.
Cette mutation va redéfinir l’industrie automobile et la manière de se déplacer, invitant chaque conducteur à anticiper dès aujourd’hui l’ère post-thermique.